La Balayeuse

L’Impératrice des Mères Lyonnaises

« La Mère Fillioux, célèbre comme le maréchal Foch, comme Anatole France, comme Kipling, comme Charlot, comme Mistinguette… » Curnonsky
(1872-1956)

 

La Mère Fillioux est née, Benoîte Fayolle, le 2 septembre 1865 sur la commune d’Auzelles, dans le canton de Cunlhat (Puy de Dôme) , au sein d’une famille nombreuse au lieu dit Fayet. Cette Auvergnate qui pris par la suite le prénom de Françoise, passa son enfance au pied des Monts du Livradois dans ce petit village à 58 km de Clermont-Ferrand, 25 km d’Ambert et 143 km de Lyon. Sur l’extrait de l’acte de naissance on obtient quelques informations sur ses parents : « ...est comparu Fayolle Annet âgé de trente ans, peigneur de chanvre... et de Mariotte Marie, âgée de vingt-huit ans, sans profession... ». C’est à Lyon que La Mère Fillioux finira ses jours le 22 octobre 1925 à l’âge de 60 ans.

Jusqu’à l’âge de quinze ans, Mlle Fayolle vit sous le Second Empire (1852-1870) où règne l’Empereur Napoléon III. L’école n’est toujours pas obligatoire pour toutes les familles nombreuses d’agriculteurs dans ses zones de pâturages reculées et isolées du bouleversement économique en marche. Elle doit partir fort jeune pour subvenir à ses moyens. Aussi, sera-t-elle obligée de quitter sa famille à l’âge de l’adolescence, comme cela se faisait à cette époque, ayant trouvé du travail dans une famille bourgeoise grenobloise.

Après avoir exercé quelques temps sur Grenoble, elle se fit embaucher à Lyon chez Gaston Eymard, directeur d’une compagnie d’assurances. C’est là qu’elle apprit durant dix ans les secrets de la fine gastronomie lyonnaise.

Notre Auvergnate épousera par la suite Louis Fillioux, dont le père possédait un petit immeuble. Les jeunes mariés investissent le rez-de chaussée et y créent un modeste fonds de marchand de vin, au 73 de la rue Duquesne. On y mangeait le casse-croûte pour 1,25 franc et le menu complet de cochonnailles, pour 3,50 francs.

À la fin du XIXe siècle, le très modeste marchand de vin devint assez vite un restaurant bourgeois, entre les tables duquel cette forte femme promenait sa robe que les clients avaient surnommée « la balayeuse ». Au-dessus du comptoir, un écriteau précisait :

« Ceux qui chantent ne doivent pas monter sur les tables »

Le menu que « La Mère Fillioux » servit pendant une bonne trentaine d’années rue Duquesne repose dans tous les bons manuels ; il ne varia guère :

Potage velouté aux truffes
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Quenelles au gratin au beurre d’écrevisse
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Culs d’artichauts au foie gras
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Poularde demi-deuil
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Fromages
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Desserts

La Mère Fillioux acquit très vite une notoriété internationale. Le monde entier de passage à Lyon passait chez « La Reine des Poulardes ». Des poulardes, la légende prétend qu’elle en découpa, durant sa vie entière, plus de 500.000 et qu’elle en faisait cuire une quinzaine à la fois, tout en conservant sans cesse le bouillon de cuisson d’une quinzaine à une autre.

Pour achever de construire sa légende, La Mère Fillioux aimait répéter au soir de sa vie qu’elle n’avait jamais utilisé que deux couteaux. L’un est visible au Musée de la Gastronomie, à Villeneuve- Loubet. Lorsque Mlle Fayolle épousa Louis Fillioux, marchand de vin, elle compléta les cochonnailles que servait son époux dans son bistrot par quelques- unes des spécialités qu’elle servait régulièrement. Les habitués virent toujours Le Père Fillioux épluchant les champignons à longueur de son temps. Ceux qui l’ont approché sont unanimes pour affirmer qu’ils n’ont jamais serré « la pince » d’un plus sympathique « Prince Consort ».

« Le Prince Consort de la Reine des Poulardes »

La Mère Fillioux gagna une réputation plus que nationale. Elle fut « La » figure à l’origine de la réputation de toutes « Les Mères lyonnaises » qui allaient se succéder par la suite. Toutes ont surfé sur la notoriété de celle qui leur avait ouvert les portes de la renommée gastronomique des « Trente Glorieuses », à commencer par celle qui fut son apprentie La Mère Brazier.

« Au cours du XXe siècle trois mythes de la restauration Lyonnaise se sont transmis l’art culinaire de la capitale mondiale de la gastronomie. La Mère Fillioux eut comme apprentie La Mère Brazier, cette dernière pris à son tour Paul Bocuse comme apprenti. Un siècle de transmission gustative dans cette bonne ville de Lyon ».

Depuis l’après-guerre, le restaurant qu’avait repris son gendre, Désiré Fréchin, a été démoli. Le 2 décembre 1965 fut marqué par l’inauguration d’une plaque commémorative à la mémoire de La Mère Fillioux , 73 rue Duquesne, à Lyon.

La « Reine des Poulardes » reconnaît sans difficulté ces magnifiques produits fermiers achetés directement chez les éleveurs et porteurs d’une qualité indéniable. Quant au gibier de plume, c’est la Dombes qui fournit l’approvisionnement de « L’impératrice des Mères lyonnaises ».

La Mère Fillioux est la première « Mère lyonnaise » à connaître une célébrité internationale de son vivant. La clientèle étrangère, au palais raffiné, de passage dans la capitale des Gaules, ne pouvait ignorer celle qui, de son vivant, était le mythe s de la restauration lyonnaise.

La patronne c’était bien La Mère Fillioux avec son caractère approprié aux fortes personnalités et son mari, le bien nommé Le Père Fillioux, devait être un brave homme pour laisser gouverner cette patronne de renommée internationale.

A la fin du XIXe siècle et début XXe siècle , les « Mères » quittent les familles bourgeoises pour s’installer à leur compte. La Mère Fillioux fut la première à redorer le blason de ces fameuses « Mères » lyonnaises située en plein cœur de la bonne ville de Lyon. La Mère Fillioux porte haut le renom de la grande gastronomie lyonnaise. Dans une publicité peu de temps après la disparition de La Mère Fillioux on peut y lire :

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LA MÈRE FILLIOUX - D. FRÉCHIN-FILLIOUX, Gendre, Propriétaire 73, rue
Duquesne, LYON - Tél. : V. 03-19
Le restaurant connu du Monde entier
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La région Auvergne-Rhône-Alpes est un territoire richement pourvu de champignons. Les contreforts des Monts du Livradois de La Mère Fillioux , entre Ambert et La Chaise-Dieu, en sont bien le lieu de prédilection. À l’automne, les Lyonnais quittent la ville pour aller se promener dans les vastes prés et bois de la campagne alentour, en particulier dans les Monts du Beaujolais et les contreforts du Massif Central pour ramasser les champignons fraîchement poussés, que l’on mange sautés au beurre, en omelette comme celles de La Mère Fillioux servies avec le jus d’une viande rôtie ou dans la sauce crémeuse d’une volaille.

Lyon a su valoriser à son propre compte bien des recettes. La capitale des Gaules a su tirer parti des richesses puisées dans les provinces environnantes comme l’Auvergne pour sublimer l’art culinaire et devenir la ville, par excellence, de la gastronomie.

Lyon a l’art de valoriser les produits du terroir. Dans l’esprit de tous, Lyon est associée à la bonne chère, et a la plus célèbre des Mères lyonnaises : La Mère Fillioux. Tous les goûts sont servis dans cette ville emblématique de l’art culinaire. Sa renommée traverse même les frontières puisqu’on dit de Lyon, la « Capitale culinaire ». L’excellence de la gastronomie lyonnaise confirme la volonté de cette nouvelle grande région administrative de rester une référence mondiale en matière gastronomique. Nul doute que La Mère Fillioux reste l’ambassadrice de la cuisine Lyonnaise mondialement reconnue.

Bernard de Reyvialles

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